Comment les centres de formation pour apprentis envisagent-ils d’intégrer la distance dans les parcours de formation et leurs pratiques ? Comment se positionneront-ils face aux Régions ? La web-conférence organisée le 16 mai par Fffod (Forum des acteurs de la formation digitale) leur a permis d’échanger sur le développement de la formation à distance dans l’apprentissage, désormais inscrite dans la loi.
L’article 72 de la Loi El Khomri du 8 août 2016 reconnaît la possibilité de dispenser à distance tout ou partie d’une formation dans le cadre de l’apprentissage, ce qui était déjà le cas pour les autres contrats en alternance. Alors que le Fffod était intervenu pour faire porter un amendement dans ce sens, la loi est allée au delà en permettant de réaliser 100 % de la formation à distance. Mais les décrets, examinés par le Cnefop [3] le 7 mars, restent à l’état de projet et leur date de parution n’est pas encore connue.
« Les deux projets de texte sont moins précis que pour la formation continue », souligne Sabrina Dougados, avocate du Cabinet Fromont-Briens, « ce cadre réglementaire très souple est à double tranchant car il laisse une marge d’interprétation aux Régions ». Les textes indiquent que les modalités de la formation à distance devront être précisées dans la convention de création du CFA : « Cela signifie qu’il faudra l’aval de la Région sur ces aménagements pédagogiques », ajoute l’avocate. En cas de formation 100 % à distance, le projet de décret impose en outre l’accord préalable de l’inspection de l’apprentissage.
Déjà des modules à distance
Les CFA membres du Gifod ont expérimenté la FOAD depuis 2009. Certains organisent des séquences d’auto-formation tutorées, d’autres proposent un Bac pro avec un jour par semaine de cours réalisé à distance chez l’employeur, d’autres encore réalisent un tiers du temps de formation en FOAD. « Nous nous sommes appuyés sur la charte des bonnes pratiques du Fffod qui insiste sur l’importance de l’accompagnement », précise Olivier Kirsch, directeur du Gifod. Ailleurs, le CFA agroalimentaire et le CFPPA [4] Poligny ont créé 80 modules à distance pour la formation professionnelle continue, maintenant utilisés par les apprentis. « Ces modules de remise à niveau ou de révision, utilisés hors temps de travail, nécessitent déjà un accompagnement », explique Jean-Bernard Théry, directeur. Le CDFA-CFPPA de la Gironde a aussi créé des modules de remise à niveau et des modules passerelles pour la formation continue : « On va pouvoir officiellement les utiliser avec les apprentis », souligne Damien Tauzin, chargé du développement numérique.
Quelles règles pour la rentrée ?
La nouvelle législation ouvre des perspectives mais pose aussi des questions. « Quel sera le mode de financement pour la FOAD ? Quelle harmonisation entre les régions ? Comment financer la création de ressources pédagogiques ? Quels textes règlementaires seront appliqués à la rentrée ? Les CFA ont besoin de lisibilité », insiste Olivier Kirsch. Sur le fond, Damien Tauzin s’interroge sur la place à donner à la FOAD : « Les semaines en centre de formation, consacrées au socle commun et à la socialisation entre les apprenants sont déjà courtes : faut-il encore les raccourcir ? On a besoin d’être outillés et d’avoir des retours d’expérience ». Le Fffod prépare justement un guide sur la mise en œuvre de la FOAD dans l’apprentissage, qui sera présenté en décembre.
Notes
[1] Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles
[2] Centre de formation agricole et forestier
[3] Conseil national de l’emploi, de l’orientation et de la formation professionnelles
[4] Centre de formation agricole et forestier